Les entrepreneurs généraux sont chargés d’exécuter un projet de construction, et ils font habituellement appel à des sous-traitants pour accomplir la plupart des travaux alors qu’ils jouent un rôle de gestion et de coordination.

Rôle à jouer dans le cadre d’une approche intégrée

Les entrepreneurs généraux ont habituellement la responsabilité d’exécuter un projet de construction en respectant le budget et l’échéancier. Ils gèrent l’enchaînement et l’intégration des sous-traitants et des corps de métiers, et apportent leur aide à l’agent chargé de la mise en service du bâtiment. Dans le cadre d’une approche intégrée, l’entrepreneur général est ordinairement engagé au début de la conception afin de fournir de l’information sur les coûts et la constructibilité. Il est important qu’il participe aux ateliers d’harmonisation afin de connaître les attentes en matière de collaboration durant la conception et d’éviter les demandes de modification au cours de la construction.

« Les gens sont encore instinctivement portés à rejeter la faute sur les autres, mais dans un processus réellement intégré, les membres de l’équipe doivent collectivement prendre un problème en charge. Il s’agit donc de faire en sorte que les équipes fonctionnent différemment. » [Traduction] (Dave Kievet, Bolt Company)

Un entrepreneur joue un rôle essentiel dans le cadre d’un projet de construction :

  • en fournissant de l’information sur les coûts et la constructibilité durant la conception;
  • en adhérant aux valeurs et aux objectifs choisis par le propriétaire et l’équipe à l’égard de l’ensemble de la construction;
  • en collaborant avec le propriétaire, l’architecte et l’ingénieur à la résolution des problèmes.

Possibilités

La manière actuelle de procéder met souvent l’entrepreneur dans une situation précaire. Dans les projets de conception, de soumission et de construction, un entrepreneur ne dispose que d’une semaine ou deux pour évaluer les coûts d’une conception qui a pris des milliers d’heures. Il reçoit ensuite des documents exposant le projet qui contiennent vraisemblablement quelques erreurs, omissions ou ambiguïtés. La résolution de ces problèmes exige du temps et de l’argent et rend le propriétaire mécontent. Par la suite, l’entrepreneur a la responsabilité de veiller à ce que tous les sous-traitants et les corps de métiers terminent adéquatement leur travail, même si, dans bien des cas, le temps ou les ressources sont insuffisants pour leur faire savoir de quelle manière leurs travaux sont interdépendants dans un cadre plus vaste ou pour leur communiquer les objectifs écologiques du projet.

La conception et la réalisation intégrées exigent une intervention plus précoce des entrepreneurs au cours de la conception, mais cela leur permet d’économiser du temps et d’éprouver moins d’insatisfaction en fin de compte. Le fait que les entrepreneurs participent dès le départ aux ateliers d’harmonisation leur permet de s’assurer que les documents exposant le projet contiennent tous les éléments dont ils ont besoin afin de savoir pleinement en quoi consistent la portée et la conception du projet lorsque la construction commence. Cette démarche évite les demandes de modification et les retards, et diminue le temps qui est habituellement réservé au processus d’adjudication. Les entrepreneurs peuvent également recommander la participation précoce des corps de métiers, car elle permet de diminuer les risques d’erreurs d’installation ainsi que la responsabilité des entrepreneurs.

Les entrepreneurs sont en mesure de constater à quel point l’approche de conception et de réalisation intégrée diffère de celle de la conception, de la soumission et de la construction :

  • en collaborant à l’élaboration de documents qui permettent vraiment d’entreprendre une construction;
  • en étant confronté à moins de demandes de modification et de retards;
  • en ayant confiance que les sous-traitants et les corps de métiers sont tous sur la même longueur d’onde.

Mise en place d’un projet intégré

La conception et la réalisation intégrées sont souvent perçues comme un processus qui est à l’initiative du propriétaire, mais il est de plus en plus à celle des entrepreneurs. Certains de ceux qui ont acquis une réputation fondée sur la construction sans gaspillage commercialisent maintenant leur spécialisation en conception intégrée. Le fait de faire valoir aux propriétaires que ces services constituent une méthode courante permet de leur faire connaître les avantages qu’ils peuvent leur procurer. Dans le cadre d’une approche de conception et de réalisation intégrée, le choix d’un entrepreneur tient compte de ses compétences et de ses aptitudes à la collaboration (à l’instar de l’architecte), plutôt que de sa capacité à exécuter un projet à bas prix. On constate que les soumissions ne sont souvent que la meilleure des suppositions, et ce, fondée sur peu de renseignements qui ne tiennent pas compte des nombreux facteurs pouvant influer sur la construction. Pour que toute l’équipe s’entende sur les objectifs, la portée et le coût d’un projet, le propriétaire doit choisir un entrepreneur dont il croit pouvoir obtenir le meilleur rapport qualité-prix et non celui qui présente la soumission la plus basse. Cela signifie que le propriétaire qui comprend ce concept engagera probablement l’entrepreneur (notamment l’un de ceux qu’il a déjà engagés) qui propose une nouvelle manière d’aller de l’avant avec le projet.

L’étude de cas au sujet du Mosaic Center illustre un projet intégré mené à l’initiative de l’entrepreneur.

Points importants pour un entrepreneur désirant appliquer une approche intégrée :

  • Ne pas percevoir, comme c’est parfois le cas, que la conception et la réalisation intégrées donnent lieu à un processus qui est à l’initiative du propriétaire, car ce processus peut être à celle de l’entrepreneur.
  • Travailler pour des propriétaires avec lesquels des relations positives sont établies depuis longtemps.
  • Montrer qu’il est avantageux de choisir l’entrepreneur en fonction de ses compétences et de ses capacités plutôt qu’en fonction de la soumission la plus basse.

Choix des membres de l’équipe

Le succès d’un projet intégré dépendant au plus haut point du calibre de l’équipe, l’architecte doit s’intéresser aux autres parties à y incorporer. L’entrepreneur doit suggérer au propriétaire de demander préférablement des propositions à des équipes d’entreprises déjà constituées. Cela permet à l’entrepreneur de présenter une proposition en compagnie d’un architecte avec lequel il entretient déjà une bonne relation de travail.

Chef de file à titre de spécialiste en réalisation de projet à caractère intégré, Howard Ashcraft compare la constitution d’une équipe intégrée à une fusion d’entreprises (Ashcraft, 2011). Dans une fusion fructueuse, les membres de différentes sociétés créent une entité dont la culture collective reflète leurs croyances et leurs valeurs. Le choix des membres de l’équipe où un partenariat avec d’autres entreprises au sujet desquelles le propriétaire a pleinement confiance qu’elles sont en mesure de travailler en collaboration permet de veiller à ce que les cultures soient complémentaires plutôt qu’antagonistes.

S’il n’est pas possible que l’entrepreneur engage une entreprise avec laquelle il a déjà établi des relations, il pourra idéalement en choisir une qui s’est déjà montrée capable de s’adapter à un nouveau système et de s’engager pleinement à adhérer à une culture de collaboration. Cela s’applique autant à un partenaire en matière de conception qu’à des sous-traitants, dont les corps de métiers. La démarche qui a permis d’engager l’entrepreneur en fonction de ses qualités et de son attitude au lieu de la soumission la plus basse doit aussi s’appliquer aux corps de métiers. Des antécédents de créativité et de persistance aident grandement les membres d’une équipe à surmonter les obstacles d’un projet intégré lorsqu’ils n’ont pas travaillé ensemble auparavant.

Dans la mesure du possible, il est préférable qu’un entrepreneur travaille avec des gens qu’il connaît ou avec lesquels il a déjà pratiqué la conception et la réalisation intégrées. S’il doit choisir de nouveaux partenaires, il est recommandé de :

  • favoriser ceux qui possèdent des compétences et des capacités;
  • préférer ceux qui sont désireux de collaborer au sein de l’équipe.

Choix des membres de l’équipe dans le cadre d’entrevues

Les entrepreneurs doivent se montrer capables de collaborer, même s’ils n’ont pas déjà travaillé dans le cadre d’un projet visant la conception et la réalisation intégrées. Ils peuvent prouver une telle chose en faisant état d’antécédents en conception et en construction sans gaspillage ou en conception intégrée, et en décrivant de quelle manière ils se sont adaptés à des projets ayant un caractère plus collaboratif. Il est utile d’engager les sous-traitants et les principaux corps de métiers à ce stade-ci, parce qu’il est avantageux d’obtenir de l’information précise sur les coûts et la constructibilité et de compter sur une équipe solidaire avant d’entreprendre la construction.

Points importants lors du choix des membres de l’équipe :

  • Accorder de l’importance à l’expérience acquise.
  • Demander des précisions telles que « De quelle manière avez-vous collaboré différemment dans le cadre de ce projet par rapport à d’autres? ».
  • Engager le plus tôt possible les principaux corps de métiers.

Co‑apprentissage et décisions concertées pour surmonter la courbe d’apprentissage

Des études de cas montrent qu’une fois qu’une équipe a mené à bien un premier projet intégré, elle est beaucoup plus efficace dans le cadre d’autres projets (voir l’étude de cas au sujet de l’usine de traitement d’eaux usées Lion’s Gate). Les membres de l’équipe ne pourront passer du stade de « spécialistes » à celui de « co-apprenants » que si la collaboration a cours au sein de l’équipe, et si elle laisse place aux suggestions et à l’ouverture d’esprit. L’entrepreneur doit favoriser une culture de collaboration et faire preuve de persistance à ce sujet lorsqu’il engage tous les participants. Si tous les intervenants restent engagés tout au long du processus, ils seront encore plus efficaces lorsqu’ils travailleront ensemble sur un autre projet.

Points importants :

  • Les équipes qui ont réalisé un ou plusieurs projets intégrés sont plus efficaces par la suite dans le cadre d’autres projets.
  • Le fait d’avoir appris comment prendre des décisions concertées représente une compétence.
  • Il est possible de favoriser un esprit de collaboration en encourageant les partenaires commerciaux à s’exprimer.

Recours à la modélisation des données du bâtiment

En 2012, 74 p. 100 des entrepreneurs ont utilisé la modélisation des données du bâtiment (MDB), soit un plus fort pourcentage que les architectes (Smart Market Report, 2012). Les logiciels de MDB permettent par exemple de savoir où passeront les réseaux de conduits dans les éléments de charpente et de visualiser les derniers éléments afin de minimiser les erreurs et les malentendus. Les modèles peuvent servir à préfabriquer des systèmes par l’entremise de divers corps de métiers, ce qui favorise une diminution de la main-d’oeuvre sur place, améliore la qualité et assure une plus grande sécurité dans le milieu de travail. Les couches de données du modèle relatif au calendrier des travaux et à la température permettent également à l’entrepreneur de comparer les diverses options de séquençage de ces travaux. Les modèles de MDB peuvent faciliter la collaboration parce qu’ils nécessitent un degré élevé de confiance et de communication entre l’entrepreneur et l’équipe de conception. À chaque itération de la conception, lorsqu’il faut ajouter ou modifier des caractéristiques, il est utile de détecter les interférences et de résoudre les problèmes avec l’équipe à mesure qu’ils se présentent. Au cours de la construction, il est recommandé de conserver le modèle et de faire en sorte qu’il constitue un point d’orientation pour les sous-traitants et les corps de métiers.

Points importants afin d’obtenir le maximum d’avantages de la MDB :

  • Utiliser la modélisation afin de soutenir le processus de préfabrication par les divers corps de métiers.
  • Exécuter un processus de détection des interférences à chaque itération de la conception.
  • Conserver le modèle tout au long de la construction.

Construction en fonction de méthodes sans gaspillage

Fondées sur la prémisse consistant à optimiser la valeur tout en minimisant la masse de déchets, les méthodes de conception et de construction sans gaspillage encouragent la collaboration, favorisent l’efficacité, et ouvrent la voie à la conception et à la réalisation intégrées en raison du fait que certains de leurs principes se recoupent. Elles favorisent également l’utilisation efficace des matériaux, ce qui représente un important objectif en matière de durabilité. Dans le cadre d’un projet intégré, plusieurs méthodes sans gaspillage peuvent être utiles à cette fin, notamment les suivantes : le Last Planner® System, qui offre plusieurs strates d’échéanciers de plus en plus détaillés servant à établir un échéancier de réalisation plus fiable sur demande dans un cadre de collaboration; la livraison juste-à-temps, qui offre un système minimisant les déchets de matériaux et les problèmes de stockage; l’analyse des causes fondamentales, qui offre un outil de résolution de problèmes en collaboration. Ces outils et d’autres du même genre peuvent tous servir au cours du processus de construction, mais il faut quand même procéder à une harmonisation précoce et favoriser la participation au début de la conception afin qu’elle soit fructueuse.

Principaux exemples de méthodes sans gaspillage :

  • Le Last Planner® System
  • La planification et la réalisation sur demande
  • La livraison juste-à-temps
  • L’analyse des causes fondamentales (analyse des cinq causes)

Outils pour surmonter les obstacles

La conception et la réalisation intégrées n’empêchent pas les obstacles et les défis que peut susciter un projet, mais elles aident à trouver les bonnes solutions même si la construction est terminée. Si des problèmes surgissent, la construction sans gaspillage offre le moyen de trouver de telles solutions, notamment la technique d’analyse des cinq causes permettant à une équipe de trouver les raisons d’un problème en se demandant cinq fois de suite pourquoi un tel problème existe. Cela peut s’avérer particulièrement utile pour déterminer qui devrait participer à la recherche d’une solution, compte tenu du nombre d’intervenants participant au projet au moment où la construction commence. Un autre outil, le registre des contraintes, permet d’exercer un suivi des problèmes et de demander à certains intervenants de se charger de les résoudre avant une date déterminée. Cela permet au projet de progresser tout en résolvant les problèmes à mesure qu’ils surgissent (Lean Construction Institute, 2015).

  • Analyse des cinq causes : technique de résolution de problèmes utilisée pour connaître les causes fondamentales d’une situation en se demandant au moins cinq fois de suite pourquoi un problème existe, afin d’aller au-delà des symptômes apparents.
  • Registre des contraintes : liste des contraintes identifiant la personne qui s’est engagée à résoudre un problème avant une date convenue. Cette liste est habituellement établie au cours d’un examen du plan de six semaines, lors du constat de travaux qui donnent lieu à des contraintes.